Centre Régional Résistance & Liberté

Organisation Civile et Militaire (OCM)

Mouvement de Résistance implanté en zone occupée, principalement tourné vers l'action paramilitaire et le renseignement. Il se développe en Deux-Sèvres à partir de l'automne 1942. L'OCM siège au Conseil National de la Résistance.

Fondation

L’Organisation Civile et Militaire est fondée à Paris en décembre 1940. Comme son nom l'indique, elle est le fruit de la fusion de plusieurs groupes composés de militaires de carrière (le colonel Heurteaux et le colonel Touny), d’anciens dirigeants de la Confédération des travailleurs intellectuels (Maxime Blocq-Mascard, André Sainte-Lagüe) et d'industriels (Arthuys).

Le mouvement recrute principalement parmi les hommes d'âge mûr, issus de la bourgeoisie (industriels, hauts fonctionnaires, cadres, officiers). L'objectif est de bâtir une organisation paramilitaire clandestine capable de constituer une force d'opposition à l'occupant et un appui interne à l'offensive alliée. L'organisation du mouvement est calquée sur celle d'un corps d'armée, suivant une stricte hiérarchie. La France occupée est divisée en deux zones d'action : zone A et B.

Créer des liens, structurer

L’établissement d'une liaison entre l'OCM et le réseau de renseignement Confrérie Notre-Dame [7] (CND) puis avec Londres à l'hiver 1941 - 42 favorise son développement rapide en zone occupée. Avec le réseau CND elle crée l'efficace réseau de renseignement Centurie et organise propagande, filières d’évasion, renseignements et action paramilitaire.

Penser l'après guerre

Une singularité de l'OCM dans les mouvements de zone nord est l'analyse qu'elle porte sur la situation de la Résistance intérieure durant le conflit, l'importance de son unification et la réflexion menée sur le projet de société à développer à la Libération. L'OCM publie ses « Cahiers, Études pour une révolution française », 4 numéros publiés à 3000 exemplaires chacun en 1942 et 1943. Abordant des thèmes tels que la rénovation de l'enseignement, l'urbanisme, la presse ou encore la réforme des institutions sociales, ces textes traduisent le désir de leurs auteurs d'une société nouvelle après guerre. À partir de 1943, l'OCM siège au Conseil national de la Résistance.

L'OCM en Deux-Sèvres de novembre 1942 à juin 1943

André Granclément (Bernard), responsable en zone occupée de la zone d’action s’étendant des Basses-Pyrénées au Poitou et à l’Anjou (zone B), confie en novembre 1942 à Didier Delahaye (Jérôme), le développement de l’Organisation Civile et Militaire dans la Vienne, les Deux-Sèvres et la Vendée. Celui-ci, militaire de carrière dans les troupes coloniales et originaire de La Chapelle-Saint-Laurent, nomme des responsables départementaux : Jean Musso pour la Vienne, Jean Pierre pour les Deux-Sèvres et Armand Giraud pour la Vendée. Didier Delahaye est secondé par Frédéric Jouffrault (Jacquier) qui œuvre principalement en Vendée et dans les Deux-Sèvres.

Jean Pierre, cheville ouvrière du développement de l'OCM en Deux-Sèvres, s'appuie sur des résistants locaux qui procèdent au recrutement de nouveaux membres et font l'interface entre les responsables départementaux et la base du mouvement.

Parmi ces hommes « relais » on compte Roger Hélier (Émile Daunier). Originaire de La Chapelle-Saint-Laurent, Hélier œuvre à la recherche de terrains de parachutage, au recrutement d’agents et à la formation des équipes de réception. Sous la responsabilité de Frédéric Jouffrault, il supervise l’ensemble des opérations aériennes. Dans le triangle Bressuire-Parthenay-Thouars des groupes très actifs se constituent. Dans le Bocage, des équipes sont constituées à La Chapelle-Saint-Laurent et Bressuire autour de Frédéric Faucon et à Moncoutant en prenant appui sur le groupe constitué par Maurice Clisson, Jean Daguisé, Henri Gourdon et Fernand Gilbert. Pour la Gâtine, un noyau important naît à Parthenay sur les bases du groupe formé par Eugène Brisset, directeur du ciné-théâtre de la ville. Des groupes actifs sont présents à Maisontiers et Louin/Saint-Loup-sur-Thouet dirigés par le Dr Daniel Bouchet, à Neuvy-Bouin, Lageon, et Gourgé. Enfin, dans le Thouarsais où Ludovic Courtin, employé SNCF, recrute parmi les cheminots de la ville, et Roger Hélier quant à lui sollicite la famille Pichot domiciliée à Tourtenay.

Dans les Deux-Sèvres, le premier semestre 1943 constitue l'apogée de l'OCM tant par le nombre de résistants (évalué à 200 en juillet) que par la multiplication des actions, notamment les parachutages concentrés dans le nord, entre Parthenay et Thouars. De mars à juillet 1943, les équipes réceptionnent environ 20 tonnes d’armes qui sont dissimulées en 7 dépôts.

Les parachutages pour l'OCM réceptionnés durant cette période :

Terrain de Villeneuve près de Neuvy-Bouin 

  • 12 mars 1943 : message "Tout ce qui approche de l'amour éloigne de la mort " , environ 1 tonne de matériel récupérée et cachée dans les douves du château de Bressuire [8].
  • 13 avril 1943 : même terrain, même message, 1 tonne de matériel récupérée, cachée au même endroit.
  • 13 mai 1943 : message "Ne désespérez pas d'une amante en furie", 1 tonne de matériel cachée à la Berderie à La Ronde. [9]
  • 14 juin 1943 : message "Au sang de ses sujets un roi doit la justice", 2.5 tonnes de matériel cachées à la gare de la Chapelle-Saint-Laurent.
  • Voir la fiche consacrée à ces actions [10]

Terrain La Petite Champagne à Tourtenay

  • Nuits du 14 au 15 juin et du 16 au 17 juin 1943, message " Les exemples vivants sont d'un autre pouvoir ", 2 fois 2 tonnes de matériel cachées dans une cave souterraine de la ferme Pichot. Voir la fiche [11]

Terrain Le Bois Rocard à Boismé

  • Nuits du 14 au 15 juin et du 16 au 17 juin 1943, message : " Le roi disait à la reine Victoire ". 3 et 2 tonnes de matériel cachées en partie à Boismé et dans les douves du château de Bressuire. Voir la fiche [12]

Terrain Le Mélier à Lageon

  • Nuits du 19 au 20 juin et du 20 au 21 juin 1943, message " Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là ", 2 fois 1 tonne de matériel cachées à Gourgé. Voir la fiche [13]

Terrain Le Bois de Dix Heures à Maisontiers

  • Nuit du 24 au 25 juillet 1943, message " Si je meurs, venge-moi ", 3 tonnes de matériel cachées au Bois de Dix-Heures. Voir la fiche [14]

L'été 1943, l'OCM démantelée en Deux-Sèvres

En Deux-Sèvres, la multiplication des actions et des recrues qui n'ont, pour l'immense majorité, aucune expérience de la clandestinité, finit par attirer l'attention des polices allemandes et françaises.

À partir de l’été 1943 et au lendemain d’arrestations de responsables de l’organisation dans la région bordelaise, les services du SIPO-SD (forces répressives allemandes) de Poitiers démantèlent l’Organisation Civile et Militaire. Dans le triangle Thouars-Bressuire-Parthenay, 52 membres actifs sont arrêtés entre le 5 août et le 4 novembre 1943. Didier Delahaye, réfugié à Paris depuis le mois de juin 1943, est arrêté le 11 octobre 1943 par les services parisiens.

Tous sont internés à la prison de la Pierre Levée [15] à Poitiers. Les responsables départementaux, Daniel Bouchet, Eugène Brisset, Didier Delahaye et Roger Hélier, sont condamnés à mort le 18 décembre 1943 sur jugement du tribunal militaire allemand. La sentence est commuée en travaux forcés à perpétuité c’est-à-dire la déportation. En janvier 1944, quarante-trois d’entre eux sont transférés vers le camp d’internement de Compiègne-Royallieu avant d'être déportés à Buchenwald [16] le 21 janvier 1944. Vingt-quatre périssent, victimes du système concentrationnaire nazi. Les armes quant à elles - à l'exception du dépôt de Gourgé où ont été cachées les armes du parachutage de Lageon - sont récupérées par l'Occupant et ne profiteront pas à la Résistance.

Basculement vers le sud du département

Depuis le printemps 1943, probablement le mois de mai, Jean Pierre a noué certains contacts avec la région de Niort et notamment avec Edmond Proust [17] (Chaumette). Celui-ci, instituteur et militaire de réserve est parvenu à constituer autour de lui un petit groupe de résistants. L'épisode d'arrestations massives de l'été 1943 favorise le basculement du centre de gravité de l'OCM au sud du département. La recherche de volontaires et de nouveaux terrains et l'organisation de parachutages reprend peu à peu mais plus lentement et difficilement du fait d'équipes formées récemment, encore inexpérimentées et moins nombreuses que les équipes du nord.

Les qualités d'Edmond Proust dans l'action et en tant qu'organisateur des groupes à sa charge sont remarquées et à partir d'août 1943, il remplace Jouffrault à la tête de l'OCM départemental.



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