Centre Régional Résistance & Liberté

Les combats de la Libération

La réussite du débarquement allié en Normandie le 6 juin 1944 nécessite de ralentir la remontée vers la Normandie des renforts allemands stationnés jusque-là dans le Sud-Ouest de la France. C'est à la Résistance intérieure, épaulée par des troupes d'élite alliées, qu'est confiée cette mission.

Unis pour la libération

Tant attendu et annonciateur d’une libération prochaine, le débarquement Allié, sous le commandement du général Eisenhower le 6 juin 1944 sur les côtes normandes, déclenche l’insurrection armée. Point d’orgue pour la réussite de cette vaste opération : ralentir la progression vers la Normandie des troupes allemandes stationnées dans le Sud-Ouest de la France.

Le Poitou est une des zones cruciales dans ce vaste territoire s’étendant de la Loire au Rhône. Par ses infrastructures routières et ferroviaires reliant le Sud-Ouest au Nord-Ouest de la France (ligne Paris-Bordeaux, axes rejoignant Nantes), il est une voie naturelle de passage. Trois missions franco-britanniques, organisées sous couvert du Special Operations Executive [5] et du Bureau Central de Renseignements et d’Action [6] se déploient et agissent directement dans les Deux-Sèvres.

La mission "Samuel" du réseau Shipwright, la mission Jedburgh "Harold" et l’opération "Dickens" du Special Air Service ont pour objectifs :

  • de coordonner les actions des Forces Françaises de l’Intérieur en lien avec la stratégie globale des Alliés pour la libération de la France.
  • d’apprécier la nature et l’importance des groupes locaux de résistance et de contribuer à leur armement à l’approche des combats de la Libération.
  • de transmettre à Londres tous les renseignements utiles à la neutralisation des troupes allemandes (le mouvement des troupes, les cibles militaires stratégiques comme les dépôts de carburant, les convois ferroviaires,…).

Le Special Air Service (SAS)

Groupe du 3e régiment SAS qui a rejoint Thénezay, de droite à gauche : Andrieu, Verchère, Léger, Thénezay- 1944 © Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes [7]

3e régiment SAS - Thénezay,
1944

 "Qui ose gagne" , telle est la devise de ces hommes. Formation d’élite pour effectuer des incursions derrière les lignes ennemies, le Special Air Service est constitué dès 1941 par les britanniques.

Au début de l’année 1942, une poignée de Français Libres rejoint ces troupes de parachutistes. Connu sous le nom de " French Squadron ", il forme l’embryon de ce qui va devenir les 3e et 4e régiments SAS.

Ce sont quelques mille parachutistes français qui sont prêts au combat à la veille du jour J, aux côtés de leurs camarades britanniques des 1er et 2e régiments SAS.

Soixante-dix hommes du 3e régiment SAS, dirigé par le capitaine Fournier, s’illustrent, par l’opération "Dickens", dans les Deux-Sèvres.

L’opération " Dickens "

[8]

­­­Capitaine Georges Fournier, commandant lopération "Dickens", 1944 © Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes [9]

Capitaine Fournier ©
Conservatoire de la Résistance
et de la Déportation des Deux-
Sèvres et des régions limitrophes

Dirigée par le capitaine Fournier, l’opération "Dickens" débute dans la nuit du 14 au 15 juillet 1944 et s’achève le 7 octobre 1944.

­­­­Établissant dans un premier temps son poste de commandement au Bois d’Anjou, en limite des départements des Deux-Sèvres et du Maine-et-Loire, il le transfert à Amailloux (Deux-Sèvres) à la suite d’une attaque allemande.

Son équipe, formée de 70 hommes et divisée en petits groupes, agit sur l’ensemble de la région Poitou-Charentes - Vendée (à l’exception de la Charente-Maritime) et sur les départements de la Loire-Atlantique et du Maine-et-Loire.

Dans les Deux-Sèvres, trois groupes (ou stick) interviennent plus particulièrement dans les régions de Champdeniers et Saint-Marc-la-Lande ; sur les territoires de Bressuire et Parthenay et enfin ceux de Thouars et Montreuil-Bellay.

Sa mission principale, commune aux autres missions franco-britanniques, consiste en la destruction systématique de toutes les voies ferroviaires et routières et à mener des actions de harcèlement contre l’ennemi. Rapidement, il entreprend également l’armement des maquis par l’organisation de parachutages d’armes comme ceux réalisés dans la région de Cerizay en août 1944.

Le soutien des Jedburgh

Dès le début 1943, sont créées des petites missions interalliées, composées généralement de 3 hommes, destinées à être parachutées dans les maquis afin de les armer, de coordonner leur action et de créer de nouveaux maquis en fonction des besoins des Alliés.

Les équipes envoyées en France sont pour la plupart constituées d'un Américain, d'un Britannique et d'un Français.

Alors que les équipes du Special Air Service opèrent de manière relativement autonome, en vue d'actions militaires, les Jedburgh entretiennent des rapports plus étroits avec les maquis. Dans les Deux-Sèvres, ils coordonnent, pour parti, l'action de l'Armée Secrète [10] et des Francs-Tireurs Partisans [11]. Le Major Whitty, responsable de la mission "Harold", est un acteur principal de la naissance des Forces Françaises de l'Intérieur [12] des Deux-Sèvres.

Ces différentes missions sont fréquemment en contact entre elles et opèrent tant en concertation avec le commandant Maingard de la Ville, alias Samuel du réseau Shipwright, qu’avec le capitaine Tonkin du 1er régiment SAS, basés tous les deux dans le département voisin de la Vienne.

La mission Jedburgh « Harold »

[13]

­­Le Major Whitty au premier rang à gauche, Deux-Sèvres, 1944. Cliché probablement pris après la Libération. © Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes [14]

Le Major Whitty au premier rang à gauche,
Deux-Sèvres, 1944.© Conservatoire de la
Résistance et de la Déportation des Deux-
Sèvres et des régions limitrophes

Parachutée au dessus de la région de l'Absie dans la nuit du 15 au 16 juillet 1944 [15], l'équipe est commandée par le major Whitty (Anglais) assisté du lieutenant Jolliet (Français) et du sergent Verlander (Anglais). Les jeds accompagnent deux officiers SAS de l'opération "Dickens" pour leur permettre d'établir une base qui serait renforcée ultérieurement.

La mission "Harold" a pour objectif de soutenir la constitution des maquis, principalement ceux de l'Armée Secrète en apportant un savoir-faire et une aide technique et assurer le sabotage des lignes de chemin de fer et des communications autour de l'axe Poitiers-Nantes.

Soucieux dans un premier temps de conserver leur autonomie vis à vis de la France Libre, Les Francs-Tireurs Partisans tentent d'éloigner ce jed-team de l'Armée Secrète et de son chef Edmond Proust (Chaumette) [16]. Ceux-ci parviennent tout de même à se rencontrer le 9 août au sud de Secondigny. A l'issue de la réunion, Whitty décide d'œuvrer en priorité dans l'intérêt de l'Armée Secrète. Cernant plus clairement la situation, la mission "Harold" tente dès lors d'imposer Chaumette comme seul chef des FFI des Deux-Sèvres.

Contraints de se plier aux exigences de Whitty qui est seul à pouvoir obtenir des parachutages, Robin et Chaumette jettent les bases d'un accord le 15 août 1944. Le pouvoir est partagé et les Francs-Tireurs Partisans acceptent Chaumette comme chef départemental des FFI. La coordination des actions de l'Armée Secrète et des Francs-Tireurs Partisans est désormais possible.

Enfin des armes !

Forces Françaises de l’Intérieur (Armée Secrète et Franc-Tireurs Partisans) et missions alliées ne forment qu’un pour les combats de la Libération. Or l’armement reste un problème crucial. Seuls les contacts établis avec la mission " Samuel ", puis avec le capitaine Fournier (opération "Dickens") et enfin avec le major Whitty (mission "Harold") le résout.

Le contact s’établit à la mi-juillet 1944. Via les ondes de la BBC, les messages, synonymes de parachutages d’armes, se succèdent. À intervalle régulier, le ciel des Deux-Sèvres est le théâtre de ces opérations.

Plus de 60 tonnes d’armes sont parachutées et équipent la résistance deux-sévrienne entre le 14 juillet et le 26 août 1944.

L’opposition est vive entre Chaumette (responsable de l’Armée Secrète) et Robin (chef des Francs-Tireurs Partisans) sur l’attente ou non de l’ordre des Alliés pour passer à l’action. Pour autant, en dépit de ces divergences et de la lutte qui les anime pour l’accès à la direction des FFI des Deux-Sèvres, ils se partagent le contenu des parachutages de la fin du mois de juillet 1944.

Bien qu’encore mal armés, les FFI sont en mesure de répondre à l’ordre d’insurrection lancé dans la nuit du 13 au 14 août 1944 par le général Koenig sur les ondes de la BBC.

" La république nous appelle "

Par ce message diffusé dans la nuit du 13 au 14 août 1944 sur les ondes de la BBC, le général Koenig appelle la résistance deux-sévrienne au soulèvement général.

En concertation avec les Alliés, les Forces Françaises de l’Intérieur mènent principalement des actions de harcèlement, de guérilla et de sabotages pour ralentir voire interdire la circulation des troupes allemandes sur les voies ferroviaires et routières.

Conduites dans les semaines qui précèdent et suivent le débarquement allié en Normandie, tant par les forces de l’Armée Secrète que par les Francs-Tireurs Partisans, ces actions s’intensifient massivement. Au cœur des combats de la libération, pas un jour ne passe sans que les convois allemands soient attaqués et pris en embuscade ou que les lignes ferroviaires soient sabotées.

Le 26 août 1944, le général Täglischbeck, commandant la Felkommandantur 651 de Niort, reçoit l’ordre de préparer le retrait des troupes du Sud-Ouest vers la Bourgogne.

Les Allemands abandonnent leurs cantonnements et sièges administratifs quelques jours plus tard.

Dans les tout derniers jours du mois d’août, c’est un souffle de liberté qui plane sur les Deux-Sèvres [17].

 

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