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Champ de tir de Biard (Vienne)

Principal lieu d'exécution de la région Poitou-Charentes durant l'occupation allemande, le champ de tir de Biard, à quelques kilomètres de Poitiers, est un outil de répression de la Résistance régionale.

Biard 1942-44, principal lieu d'exécution de la Région Poitou-Charentes

Depuis la fin du XIXe siècle, le terrain militaire de l'armée française, situé sur la commune de Biard, servait à l’entraînement des soldats français. Ce monticule de terre recouvert de genêts est le théâtre d’événements tragiques à partir de 1942. L'occupant le choisit pour l'application des condamnations à mort prononcées par le tribunal militaire allemand de la Feldkommandantur 677 de Poitiers ou dans le cadre de la politique des otages définie par « le Code des otages » promulgué fin septembre 1941 par Otto von Stülpnagel (Militäberfehlshaber in Frankreich). Ce lieu revêt tous les caractéristiques d'isolement requis : à l'abri des regards, excentré et accessible par une seule route.

Provenance des victimes

Principalement extraits de la prison de la Pierre-Levée à Poitiers, les condamnés à mort sont transportés en convois jusqu’au champ de tir. Après chaque exécution, les corps sont inhumés en divers cimetières des communes alentours (Poitiers, Croutelle, Quinçay, Fontaine-le-Comte, Mignaloux-Beauvoir, Sèvres-Anxaumont, Buxerolles, Saint-Benoît…).

De mars 1942 à juillet 1944, 128 hommes sont exécutés en ce lieu : 9 internés du camp de Rouillé désignés otages, sont exécutés en représailles d’attentats perpétrés contre les troupes d’occupation, 119 sont exécutés suite aux sentences prononcées par le tribunal militaire allemand.

Hommage

Le 8 mai 1949 est érigée sur le site une dalle de bronze portant inscription de 130 victimes. Elle matérialise ce qui fut le principal lieu d’exécution dans la région Poitou-Charentes entre mars 1942 et juillet 1944.

La politique des otages

L’attaque de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) par l’Allemagne nazie, le 22 juin 1941, transforme les visages de la résistance. Certains résistants communistes privilégient la lutte armée. Les attentats contre les officiers allemands et le sabotage des intérêts de l’occupant se multiplient. En réaction, ce dernier instaure un climat de terreur pour briser toute forme de résistance et limiter le soutien de la population à la désobéissance grandissante.

La répression se radicalise à l’été 1941. Hitler exige des représailles massives. Le maréchal Keitel ordonne, le 16 septembre 1941, l’exécution de 50 à 100 communistes pour un soldat allemand tué. La « politique des otages » est officiellement instaurée. Le 1er mars 1942, une sentinelle allemande est exécutée rue de Tanger à Paris. Le 30 avril 1942, un sabotage meurtrier frappe un train de soldats permissionnaires allemands dans le Calvados. En réaction, le Commandement militaire allemand décrète l’exécution d’otages. Neuf d’entre eux, militants du Parti communiste clandestin, actifs en région parisienne, sont extraits du Centre de séjour surveillé situé à Rouillé près de Poitiers. La justice française les avait préalablement condamnés pour activité communiste, diffusion de journaux clandestins (La Vie ouvrière, L’Humanité,…), détention de matériel d’impression ou participation active à des manifestations interdites. Ils sont fusillés le 7 mars et le 30 avril 1942 sur le champ de tir de Biard.

avis 22 8 41© CRRL/ Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres

Affiche du Militärbefehlshaber in Frankreich - Paris - 22 août 1941

© Conservatoire de la Résistance et de la déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes / Centre Régional « Résistance & Liberté »

 Keitel-Code otages © CRRL-Fond famille Debenest

 Lettre du Maréchal Keitel - 1er octobre 1941 - code des otages. Issu des pièces des procès - Tribunaux militaires de Nuremberg

© CRRL-Fond famille Debenest

3 décembre 1942, exécution des membres de l'OS-680

Témoignage

La sentence prononcée par le tribunal militaire allemand de la Feldkommandantur 677 le 24 novembre 1942 est exécutée le 3 décembre 1942. Ainsi se souvient André Forestier, membre du groupe OS-680.

« Le 24 novembre 1942, nous étions tous très angoissés. Tous debout et retenant notre souffle, nous attendions le verdict. Le président du tribunal prononce 11 condamnations à mort, 1 condamnation à 5 ans de réclusion, 2 condamnations à 1 an de prison, 1 condamnation à 6 mois de prison et 6 acquittements faute de preuves. A la fin de l’énonciation du verdict, Joseph Berthou qui avait déjà offert sa vie, s’écria « Vous cranez car vous vous sentez les plus forts. Mais cela n’est que provisoire, et un jour vous devrez payer cher tous vos crimes ». […] A la sortie du palais de justice, encadrés par les soldats, les condamnés menottés retrouvent leurs parents et famille qui n’ont pas pu s’approcher pour les embrasser. Moment d’une intense émotion, d’une grande tristesse sur des visages en pleurs. […] Le retour à la prison fut triste. Le recours en grâce a été refusé pour les condamnés à mort.

Le 3 décembre 1942 à midi, le commandant de la prison est venu prévenir les femmes arrêtées que leurs maris seront exécutés dans l’après-midi. Ce furent des hurlements terribles de douleur qui retentirent dans toute la prison. A 15h ce fut un remue-ménage dans la prison. On venait chercher les condamnés. René Drapeau écrivait sa dernière lettre d’adieu à ses parents. Marcel Marolleau griffonna au crayon sur un papier d’emballage bleu : « Adieu ». Joseph Berthou, que l’on venait chercher passa devant moi et s’écria : « Adieu vous tous. Adieu Simone. Nous mourrons en vrais Français. » Les autres étaient réunis dans la rotonde de la prison et là, retentirent la Marseillaise et le refrain de l’Internationale. Après leur départ, un long silence émouvant descendit dans la prison. C’était le dernier hommage aux condamnés. Le lendemain, lors de la promenade dans les courettes de la prison, j’ai gravé sur le mur de la cour : « huit Thouarsais ont été condamnés à mort le 24 novembre 1942 et fusillés le 3 décembre. Priez Dieu pour eux ».


Mémorial des fusillés (Biard) © CRRL
Mémorial des fusillés (Biard) © CRRL

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Brochure - Les fusillés sur le champ de tir de Biard 

Si vous souhaitez recevoir gratuitement la brochure papier consacrée aux fusillés sur le champ de tir de Biard réalisée par le Centre Régional " Résistance & Liberté " et l'ONAC Vienne, vous pouvez en faire la demande en contactant le Centre d'Histoire :

info@crrl.fr

05 49 66 42 99

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